La Turquie a annoncé ce dimanche 1er mars qu’elle avait lancé une offensive militaire contre le régime de Bachar al-Assad à Idleb, dans le nord-ouest de la Syrie, en réponse aux attaques de Damas qui ont infligé de lourdes pertes aux troupes turques cette semaine. Le ministre turc de la Défense a indiqué qu’Ankara n’avait « pas l’intention » d’entrer dans une confrontation avec Moscou.
Après une série d’incidents meurtriers en février, les armées turque et syrienne sont entrées en confrontation directe à Idleb ce dimanche 1er mars. Damas a confirmé avoir perdu deux avions, des Soukhoî-24, abattus par un F16 turc, précisant que les pilotes ont pu s’éjecter et sont « sains et saufs ». L’armée syrienne a annoncé avoir visé trois drones militaires turcs. Une vidéo montrant un appareil en flamme en train de s’écraser a été diffusée, rapporte notre correspondant à Beyrouth, Paul Khalifeh.
Ces combats aériens se sont déroulés dans le ciel de la province d’Idleb, au-dessus de la ville de Saraqeb, où l’armée turque et ses supplétifs syriens ainsi que des groupes jihadistes sont à l’offensive. Ils ont réussi à reprendre la ville et à couper l’autoroute M5, qui relie Damas à Alep.
« L’opération ‘Bouclier du Printemps’, déclenchée après la vile attaque du 27 février à Idleb, se poursuit avec succès », a déclaré le ministre turc de la Défense Hulusi Akar. C’est la première fois qu’Ankara annonce officiellement que ses opérations militaires sur le territoire syrien s’inscrivent dans le cadre d’une opération plus générale. Le ministre turc de la Défense a annoncé que cette opération avait commencé le 27 février, c’est-à-dire le jour de la mort de 33 soldats turcs dans une seule et même attaque attribuée au régime de Damas, rapporte notre correspondante à Istanbul, Anne Andlauer.
Dans le cadre de cette riposte, Ankara annonce un bilan – invérifiable et sans doute exagéré – de 2 212 soldats du régime tués, ainsi que de 103 tanks, 72 lance-roquettes et obusiers, huit hélicoptères, un drone et trois systèmes de défense antiaérienne abattus. « Bouclier du Printemps » est donc une opération en cours depuis quelques jours.
Si la Turquie fait cette annonce en forme de bilan maintenant, c’est qu’elle avait lancé début février un ultimatum au régime de Bachar el-Assad, lui donnant jusqu’à la fin du mois pour cesser son offensive contre Idleb et se retirer des abords des postes militaires turcs. L’ultimatum était donc censé expirer samedi soir mais, de fait, l’attaque du 27 février l’avait rendu caduc. L’armée turque confirme donc qu’elle ne se retirera pas d’Idleb et qu’elle continuera de frapper le régime.
Les affrontements ont fait des dizaines de morts et de blessés dans les deux camps. L’Observatoire syrien des droits de l’homme a rapporté que 74 soldats syriens ont été tués dans des bombardements turcs depuis vendredi dernier.
21 combattants chiites afghans et d’autres nationalités ont également trouvé la mort.
Dans la banlieue sud de Beyrouth, le Hezbollah libanais a organisé dimanche les funérailles de cinq de ses dix combattants tombés près de Saraqeb vendredi. Ce bilan élevé illustre la dureté des combats dans cette région, à un moment où l’aviation russe se fait plus discrète.
Dans son allocution télévisée, le ministre turc de la Défense Hulusi Akar indique aussi que le but de cette offensive « Bouclier du Printemps » est de « mettre fin aux massacres du régime et empêcher une vague migratoire ». Il ajoute cependant qu’Ankara n’a « ni l’intention ni l’envie d’entrer dans une confrontation avec la Russie », qui soutient le régime de Bachar al-Assad. Le président turc Recep Tayyip Erdogan et son homologue russe Vladimir Poutine doivent se rencontrer le 5 mars. D’ici là, sur le terrain, Ankara a bien l’intention de faire monter les enchères.
