L’assaut contre le dernier réduit de l’EI est lancé en Syrie

« Je peux encore sortir ? Un missile a explosé à trois mètres de nous. Ils ont bombardé une maison avec des femmes françaises et des enfants. Ils sont sous les décombres, des gens crient d’en dessous. On a dû sortir de la maison car trop proche des combats. Avec moi, on est une dizaine », écrit, affolée, au Monde sur WhatsApp, vendredi 1er mars au soir, Elise (le nom a été modifié), une djihadiste francophone toujours présente à Baghouz avec son mari.

Quelques heures plus tôt, les forces démocratiques syriennes (FDS), une coalition arabo-kurde soutenue par la coalition internationale, ont annoncé le lancement de l’offensive finale sur le dernier carré tenu par l’organisation Etat islamique (EI) aux confins sud-est de la Syrie, au terme d’une trêve de douze jours dans les combats destinés à permettre aux civils de fuir et aux combattants de se rendre.

« Nous avons lancé l’offensive car, selon nos services de renseignement, il n’y a plus de civils à Baghouz, seulement des combattants. Ils sont plus de 1 000. Le corridor humanitaire reste ouvert, ils peuvent encore sortir », dit Adnan Afrin, le commandant des FDS, à la tête de 9 000 hommes engagés à Baghouz. Depuis le début de la trêve, initialement fixée à cinq jours puis renouvelée après la découverte de milliers de civils dans la localité syrienne, les commandants des FDS ont signifié que quiconque resterait à Baghouz à la fin de l’ultimatum serait considéré comme un combattant.

« Il y a des bombardements sur les maisons et les tentes. On reçoit des balles. Ça ne fait que siffler au-dessus de nos têtes. (…) On marche sur la route, il n’y a que des balles qui tombent. Ce n’est pas possible que l’on se déplace. J’ai la moitié du corps sous une voiture. (…) Ils ont bombardé des voitures qui contenaient des munitions et ça explosait partout sur les gens dans les tentes en plein milieu. En fait, sur un kilomètre, c’est des tentes de droite à gauche, je suis au milieu des tentes dans une espèce de ravin », écrit la djihadiste francophone plus tard, disant se trouver avec de nombreuses femmes, dont certaines parlent français. Avant d’ajouter, rassurée : « Ça s’est calmé, les bombardements. »

Des civils sortant de Baghouz (Syrie) arrivent dans le campement. Les femmes et les enfants sont fouillés par les Forces démocratiques syriennes, le 1er mars. LAURENCE GEAI POUR LE MONDE

Partagée entre sa foi inébranlable en l’Etat islamique et son désir d’échapper à une mort certaine, Elise a longuement hésité. Convertie à l’islam, elle avait rejoint son mari début 2014 en Syrie, à l’âge de 19 ans, puis s’est remariée avec un autre membre du groupe djihadiste après la mort de son premier mari au combat, il y a deux ans au nord de Rakka. Mi-novembre 2018, alors que les FDS resserraient leur étau sur Hajine, dernière ville avant Baghouz, elle semblait déterminée. « Fuir, c’est un manque de foi ! On devrait rester ferme quitte à crever de faim, ce qui commence ici. Mais bon, c’est très peinant pour les enfants, il y a des enfants qui pleurent dans la rue car ils ont faim »

Quitter la version mobile