Près de 3500 manifestants pro-Navalny arrêtés en Russie, tollé au sein de la communauté internationale

Des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue samedi en Russie pour demander la libération d’Alexeï Navalny. L’opposant a été interpellé à son retour dans le pays après été soigné pendant cinq mois en Allemagne, alors que des soupçons d’empoisonnement pèsent sur l’Etat russe. Il est désormais emprisonné jusqu’au 15 février.

À l’appel de son comité de soutien, ces manifestations non autorisées ont donné lieu à des arrestations, parfois brutales, et des affrontements entre les protestataires et la police.

Au total, près de 3500 personnes ont été arrêtées à travers le pays lors de ces rassemblements, dont 1360 à Moscou et 523 à Saint-Pétersbourg, deuxième ville du pays. Selon les observateurs, il s’agit du plus grand nombre d’arrestations durant des manifestations de l’opposition enregistrées dans l’histoire de la Russie moderne.

Toutefois, selon le président du Conseil consultatif pour les droits de l’Homme auprès du Kremlin, Valéri Fadeïev, la plupart des manifestants arrêtés à Moscou ont été relâchés.

Une femme frappée à coups de pied par des policiers antiémeutes

Le Comité d’enquête russe, chargé des principales investigations criminelles dans le pays, a annoncé samedi soir l’ouverture d’une enquête sur un recours à des violences contre les forces de l’ordre et hooliganisme lors de ces manifestations.

L’antenne locale du Comité à Saint-Pétersbourg a annoncé dans un communiqué séparé l’arrestation d’un manifestant de 36 ans, soupçonné d’avoir frappé à coups de poing deux policiers en marge de la manifestation de protestation.

Pour sa part, le parquet de Saint-Pétersbourg a indiqué toujours samedi soir enquêter non seulement sur des violences envers la police, mais aussi sur celles « de la part des forces chargées de faire respecter la loi ». Ce communiqué est intervenu après la diffusion par les médias locaux d’une vidéo montrant une femme tomber au sol après avoir été frappée à coups de pied par des policiers antiémeutes.

La femme, identifiée comme Margarita Ioudina, demande dans la vidéo à trois policiers pourquoi ils arrêtent un jeune manifestant sans armes. L’un des policiers lui envoie alors un coup de pied au ventre. Margarita Ioudina a été hospitalisée samedi soir, blessée à la tête, et reste « dans un état grave », a indiqué ce dimanche un représentant de l’hôpital Djanelidze à Saint-Pétersbourg.

Leonid Volkov, un membre de l’équipe d’Alexeï Navalny, a déclaré « certainement fier, très impressionné et inspiré » par les résultats des manifestations organisées la veille. Selon lui, de nouvelles protestations devraient avoir lieu en Russie dès « le week-end prochain ».

Un tollé de la communauté internationale

Ces arrestations ont provoqué un tollé dans la communauté internationale. Les Etats-Unis et l’Union européenne ont condamné la répression des manifestations. Amnesty International a pour sa part accusé la police d’avoir « battu sans discernement et arrêté arbitrairement » des manifestants.

En France, Jean-Yves Le Drian, le ministre français des Affaires étrangères a estimé, ce dimanche dans l’émission « Questions politiques » sur France Inter, que cette vague d’arrestations une « dérive autoritaire » et une atteinte « insupportable » à l’Etat de droit. Et d’ajouter : « Je trouve aussi que le succès des manifestations sur l’ensemble du territoire russe est impressionnant » mais aussi en saluant la démarche d’Alexeï Navalny qui « mérite beaucoup de respect. Il a l’audace de ses actes ».

Selon le chef de la diplomatie française, cette affaire « remet un peu en cause la volonté de confiance et de sécurité que l’on peut avoir à l’égard de la Russie. »

Plusieurs dirigeants européens ont par ailleurs demandé l’adoption de nouvelles sanctions contre la Russie si les appels à libérer l’opposant restent lettre morte. La question sera évoquée dès lundi par les ministres des Affaires étrangères de l’UE.

De son côté, le Kremlin a riposté en accusant les Etats-Unis d’ingérence en dénonçant un communiqué de l’ambassade américaine à Moscou publié à la veille des manifestations de protestation en Russie pour exiger la libération de l’opposant Alexeï Navalny.

La représentation diplomatique américaine avait appelé sur son site les Américains à ne pas se rendre à ces rassemblements samedi, précisant les lieux où ils se déroulaient. Ces publications « constituent indirectement une ingérence absolue dans nos affaires intérieures », a réagi dimanche le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, dans une interview à la chaîne publique russe Rossia 1, dont des extraits ont été publiés sur le site de la chaîne.

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