Syrie : l’emprise territoriale de l’Etat islamique en 58 cartes

L’organisation Etat islamique (EI) n’a plus de territoire, mais possède encore des hommes et des armes. Près de cinq ans après la proclamation du « califat » à Mossoul, en Irak, les territoires que le groupe terroriste a un temps tenus ont tous été repris : en décembre 2017, en Irak, et en mars 2019, en Syrie.

L’ultime réduit de l’EI, le village de Baghouz, aux confins sud-est de la Syrie, a été récupéré samedi 23 mars, après des semaines de combats, par les Forces démocratiques syriennes (FDS), l’alliance kurdo-arabe soutenue par la coalition internationale anti-EI, conduite par les Etats-Unis.

En octobre 2014, le groupe terroriste avait atteint son apogée, contrôlant près de 60 000 km² de territoire « utile » – autant que la région Grand-Est – et 185 000 km² de zones désertiques « sous influence ». A partir de cette date, et à la faveur de l’arrivée de nouveaux acteurs (forces kurdes, irakiennes, la coalition, etc.), la superficie de ces zones n’a cessé de reculer.

Si la chute de Baghouz scelle la fin du « califat », elle ne met pas un terme au danger djihadiste en Syrie et en Irak. L’EI s’est notamment replié dans la vallée de l’Euphrate. Entre 2008 et 2010 déjà, le groupe terroriste s’était réfugié dans les confins du Nord irakien après avoir été chassé des villes. Une opération vue comme un « retour au désert » par l’EI, qui était repassé à l’offensive trois ans plus tard.

Désormais et à défaut de contrôler de larges pans de territoire, le mouvement dispose encore de cellules, dispersées dans le désert, qui se sont déjà converties à l’art de la guérilla. Entre la mi-décembre et la fin février, le groupe a mené quelque 180 attaques en Syrie. Plus de 600 personnes ont été tuées ou blessées, dont quatre Américains morts à Manbij, dans le nord du pays, d’où l’organisation avait pourtant été chassée à l’été 2016.

Comment nous avons travaillé

Depuis le début de la guerre civile en Syrie, en mars 2011, les forces qui s’opposent sur le terrain ont été régulièrement cartographiées, que ce soit par des organisations non gouvernementales (ONG), comme l’Institute for the Study of War (ISW), ou par des particuliers, comme le Néerlandais Thomas van Linge, qui dressent la carte du conflit de façon bénévole. Si au début de la guerre ces cartes étaient essentiellement syriennes, depuis la proclamation du « califat », en juin 2014, des cartes irakiennes ont également été produites.

Il a tout d’abord fallu effectuer un recensement des cartes existantes, afin de définir notre rythme. Certains produisent une carte par mois, d’autres sont plus précis et en publient une toutes les deux semaines. Pour monter la nôtre, nous avons choisi un rythme mensuel en partant de la carte la plus ancienne, en juin 2014.

Il a fallu télécharger les cartes une à une, puis les recoller (car l’Irak et la Syrie sont présentés à part), numériser les zones dans un logiciel de dessin vectoriel, puis transformer ces zones vectorielles en fichiers d’informations géographiques exploitables dans un système d’information géographique (SIG). Ce type de logiciel permet de prendre en compte la composante spatiale et la géolocalisation, ce qui rend possible le calcul de surfaces et de distances, même si elles ne sont pas fiables au kilomètre près.

Ces cartes permettent d’appréhender l’évolution des forces en présence sur le terrain et des zones qu’elles contrôlent. Il faut cependant toujours garder à l’esprit la géographie des lieux : une grande partie des deux pays est désertique, et tenir une zone située dans le couloir urbain Damas-Homs-Alep est beaucoup plus important que de tenir une surface équivalente située en plein désert. Il faut plutôt appréhender ces cartes comme une « photographie » de la situation à un instant T.

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