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Mauritanie : l’étau judiciaire se resserre autour de l’ancien président Ould Abdel Aziz

L’ex-président de la République, deux anciens premiers ministres, de hauts fonctionnaires et de puissants hommes d’affaires. Treize personnalités, toutes liées aux sphères économiques et politiques de Mauritanie, ont été inculpées, jeudi 11 mars, et placées sous contrôle judiciaire. Les faits dont les accuse le pôle anticorruption du parquet de Nouakchott sont graves : trafic d’influence, abus de fonction, dissipation de biens publics immobiliers… Mohamed Ould Abdel Aziz, chef de l’Etat entre 2008 et 2019, est notamment accusé d’enrichissement illicite, de recel de produit du crime, d’entrave à la justice et de blanchiment.

« C’est une étape qui était très attendue, se félicite Mohamed Abdellahi Bellil, le président de l’Observatoire mauritanien de lutte contre la corruption. Elle fait taire ceux qui doutaient de la détermination du parquet et prouve que la Mauritanie renforce ses institutions républicaines. » Cette décision du parquet se base sur les procès-verbaux d’une enquête préliminaire, transmis le 9 mars par la Direction centrale de lutte contre la criminalité économique, et d’une enquête financière ouverte pour de présumés délits financiers commis lors de la décennie au pouvoir de M. Ould Abdel Aziz. Menée par une commission d’enquête parlementaire, cette enquête financière a fait l’objet d’un rapport explosif de huit cents pages qui présentait l’ancien chef de l’Etat comme le décideur d’un système mêlant abus de pouvoir et corruption.

« Souiller leur honneur »

La commission s’était notamment intéressée à la gestion des revenus pétroliers de ce pays de 4,5 millions d’habitants où le niveau de vie est faible, à la vente de domaines de l’Etat et aux activités opaques d’une société chinoise de pêche. « Les opérations d’investigation ont compris la recherche et l’exploitation de milliers de documents, l’interpellation, l’audition et la confrontation de dizaines de personnes, a fait savoir le parquet dans un communiqué. Une importante quantité de renseignements a été ainsi recueillie auprès d’institutions officielles, d’études d’officiers ministériels et d’établissements privés. »

Mohamed Ould Abdel Aziz a été entendu mercredi par le procureur et, fidèle à sa ligne de défense, n’a pas répondu aux questions, évoquant l’immunité que lui confère son statut d’ancien président. « Il s’agit de traîner tout un système et ses hommes devant la police et de souiller leur honneur », a dénoncé dans un communiqué le collectif d’avocats qui le défend.

« Il s’agit maintenant de mettre fin à l’impunité [de l’ancien président] et à ses conséquences dévastatrices pour les institutions publiques et pour la société, estime Brahim Ebety, responsable d’un collège d’avocats de l’Etat mauritanien et partie civile. Les voies judiciaires permettant à la collectivité nationale de recouvrer ses biens et avoirs, frauduleusement dissipés, sont ouvertes. » Selon le parquet, ces biens sont évalués autour de 96 millions d’euros, dont 67 millions revenant à l’un des suspects et 21 au gendre de celui-ci, sans préciser s’il s’agit ou non de l’ancien président et de son gendre.

« Multiplication des crimes économiques »

Le sanguin Mohamed Ould Abdel Aziz et le placide Mohamed Ould Ghazouani, qui lui a succédé au Palais présidentiel en 2019, étaient « des amis de quarante ans ». Dans un pays qui a connu de nombreux coups d’Etat, leur amitié s’était forgée dans la réussite de deux putschs, puis lorsque M. Ghazouani fut directeur de cabinet puis ministre de la défense de M. Aziz, réélu en 2014 au terme d’un scrutin boycotté par l’opposition.

Le rapport de la commission d’enquête parlementaire sur la corruption a fait voler en éclats cette longue amitié. « Cette inculpation n’est pas le fruit d’un règlement de comptes entre deux hommes, veut croire un journaliste mauritanien qui souhaite rester anonyme. Elle prouve que la séparation des pouvoirs est désormais une réalité dans ce pays. » « Les milieux politiques et économiques ont été choqués par la multiplication des crimes économiques pendant la décennie du président Aziz, analyse Alain Antil, chercheur à l’Institut français des relations internationales (IFRI). Laisser la justice faire son travail arrange parfois les affaires politiques. »

Ces inculpations arrivent au moment où tous les partis représentés au Parlement ont décidé de former une coalition « en vue d’engager un dialogue réunissant la classe politique pour jeter les bases d’un pacte républicain. » Selon la feuille de route, il s’agit d’inclure toutes les forces politiques dans des échanges autour de la bonne gouvernance, l’unité nationale ou le processus démocratique. En justice comme en politique, une page semble vouloir être tournée en Mauritanie.

SourceAgences

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