La construction du Barrage de la Renaissance provoque des tensions entre l’Egypte et l’Ethiopie

De nouvelles négociations sont en cours entre l’Éthiopie, l’Égypte et le Soudan à propos du très controversé barrage de la Grande Renaissance, construit par Addis-Abeba sur le Nil Bleu. Ce chantier titanesque doit générer 6 500 mégawatts d’électricité, mais des tensions sont de nouveau apparues ces dernières semaines.

Des scientifiques de chaque pays ont discuté du barrage de la Renaissance en début de semaine à Khartoum, avant une réunion ministérielle entre les trois voisins, censée avoir lieu ces vendredi et samedi dans la capitale soudanaise. Cette réunion ministérielle s’annonce cruciale. Les partenaires vont à nouveau tenter de régler des questions épineuses, alors que la situation se crispe entre eux.

Mi-septembre, des ministres des trois parties s’étaient rencontréspour un sommet inédit depuis plus d’un an, mais le dialogue avait échoué. Les pourparlers avaient buté notamment sur la durée de remplissage du barrage. Le Caire veut qu’il s’étale sur sept ans, pour ne pas être pénalisé par une opération trop rapide et brutale. Les Égyptiens, dont 90% de leurs réserves en eau viennent du Nil, ont également exigé un minimum de 40 milliards de m3 par an et que des ingénieurs égyptiens soient présents sur le chantier.

70% de travaux achevés

L’Éthiopie a mal réagi. Son ministre de l’Eau a dénoncé des propositions « inappropriées », « non respectueuses des accords en vigueur ». Sileshi Bekele a même parléd’un viol de souveraineté. En effet, Addis-Abeba souhaite remplir son barrage en trois à cinq ans, selon les sources. Le pays estime avoir perdu assez de temps avec ce chantier qui a déjà pris cinq années de retard. Pour accélérer le rythme, en août les autorités ont remplacé Metec, le conglomérat d’État en charge du projet, par un groupe d’entreprises chinoises, françaises et italiennes.

Aujourd’hui, les travaux sont achevés à 70%. Les ingénieurs disent pouvoir commencer à remplir dès l’an prochain. Pas question donc pour Addis-Abeba de ralentir si près du but. Quant à avoir des ingénieurs étrangers sur son chantier, c’est un viol de souveraineté estime l’Ethiopie.

Manque de confiance

Devant l’ONU il y a deux semaines, le président Abdel Fatah al-Sissi a déclaré que l’eau du fleuve était une question de survie pour les Égyptiens. Il a appelé la communauté internationale à jouer un rôle constructif. Jeudi, Washington a d’ailleurs reconnu le droit au développement de chaque nation. Mais les Américains ont demandé à chacun de négocier de bonne foi pour un accord équitable.

Le blocage résulte d’un manque de confiance selon le chercheur William Davison. Selon lui, « si le flot du Nil est réduit, il y aura un impact économique mais pas de menace existentielle ». L’expert estime qu’un compromis est possible. Si un accord est conclu à Khartoum, il suggère de mettre ensuite le dossier entre les mains de la Commission du Bassin du Nil, créée il y a dix ans et qui pourrait gérer les conflits. Une institution regroupant six pays, mais que l’Egypte et le Soudan ont pour l’instant refusé de rejoindre.

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