En dénoncant « un trafic des êtres humains », les Soudanais victimes des EAU racontent l’enfer

Courrier arabe

Un autre groupe de 209 Soudanais est arrivée à Khartoum, rapatriés d’Abu Dhabi, à l’ombre de l’affaire qui accusa la compagnie émiratie «Black Shield Security», de les avoir dupés et engagés comme mercenaires en Libye et au Yémen, au moment où des sources dénoncent les actes d’un réseau de trafic des êtres humains.

Traumatisés et dans un état psychologique instable, ils ont bénéficié de 5500 dirhams émirati comme indemnisation. Une somme qu’ils jugent dérisoire par apport à l’enfer qu’ils ont vécu.

Le site informationnel «al-Jazeera.net» a suivi l’affaire de près, dans un rapport sollicitant les témoignages des certaines victimes et cherchant les renseignements auprès de sources bien informées.

Et c’est ainsi, que la rédaction de Courrier arabe a mis la lumière sur les traits importants de ce rapport, soulignant ses détails et ses révélations.

Le cauchemar à Abu Dhabi   

«Al-Bara Mohamed Otman», l’une des victimes de retour à Khartoum, raconte son histoire depuis son commencement, il note avoir voyagé aux EAU, à travers «Black Shield», en compagnie d’un groupe composé de 209 personnes, «choisies après avoir succédé à des tests, qu’avaient passé des milliers de candidats», signale-t-il.

Il ajoute que dès leur arrivée à Abu Dhabi, lui et ses compagnons ont été envoyés à un camp d’entraînement militaire, situé à proximité de la capitale. «On s’y attendait pas. Une fois au camp, nous avons été minutieusement fouillés et nos téléphones ont été confisqués», a-t-il continué.

Selon «Al-Bara Mohamed Otman», c’est à travers les groupes de Soudanais arrivées plus tard, que lui et son groupe avaient été informés au sujet de l’exploitation des Soudanais, par la compagnie émiratie, comme mercenaires en Libye et au Yémen.

«À entendre cela, tout ceux qui se trouvaient au camp avaient protesté, et sous les pressions, on nous a rendu nos téléphones, et on a pu contacter nos proches, et on leur a demandé d’agir pour nous ramener au pays», détaille le jeune homme.

Il décrit l’endroit comme étant très vaste et sous haute surveillance, gardé nuit et jour par les officiers émiratis, «il était impossible de fuir bien que certains avaient tenté, en vain, de s’échapper», a-t-il ajouté en regret.

Un engagement optionnel mais peu convaincant

Le témoin continue en notant qu’en suite, les Soudanais, au camp d’entraînement, avaient demandé de voir un représentant de «Black Shield».

Ayant céder aux pressions, le PDG de la compagnie arriva, et leur expliqua qu’ils étaient obligés de suivre des entraînements de 6 à 7 semaines, avant de pouvoir choisir de travailler dans des postes de sécurité à l’intérieur des EAU ou à l’étranger.

«Al-Bara Mohamed Otman» ajouta: «Le PDG de Black Shield, un homme émirati, nous précisa que les EAU avaient des investissements en Arabie saoudite, en Libye et au Soudan, et souligna que si l’un de nous choisissait d’aller à l’étranger, son salaire sera doublé».

Il continue en certifiant que la majorité des jeunes avaient choisi de rentrer chez eux, «alors le PDG leur demanda de quitter la salle et de préparer leur rapatriement».

Détruire les preuves et étouffer l’histoire   

De sa part, «Mustapha Ibrahim Mustapha» raconte que «les officiers émiratis, responsables de la sécurité du camp, avaient paniqués, suite aux protestations des Soudanais qui avaient insisté à connaitre le sort de leur compatriotes envoyés en Libye».

Il signale que les opérations de fouilles avaient été multipliées, cherchant des preuves contre eux et supprimant les vidéos qu’avaient filmées les jeunes sur leurs téléphones.

Un réseau de trafic des êtres humains

Pour éclaircir un peu plus cette affaire, un ancien policier, qui avait exercé auprès d’Interpol, affirme que «des militaires soudanais à la retraite, des policiers, des compagnies soudanaises de sécurité et l’administration des passeports étaient impliqués dans cette affaire».

Il explique qu’il s’agit d’une affaire de trafic des êtres humains, orchestrée par un réseau très dangereux, et signale que «pendant plus de 5 mois la compagnie émiratie, à travers deux agences de voyage soudanaise «Amanda» et «al-Amira», avait pu envoyer près de 880 jeunes, divisés en 3 groupes».

Exploiter les nécessites jusqu’au bout 

La source a notamment souligné le fait que les Émiratis obligeaient les Soudanais à choisir entre se joindre à leur armée pour sécuriser les régions pétrolières, en échange de 3 mille dollars, ou travailler dans la police ou dans des emplois de sécurité pour 1200 dollars, signalant que plusieurs étaient tentés par cette somme, «car ils étaient dans des situations économiques difficiles».

Dans ce contexte, elle indiqua qu’une fois de retour à Khartoum, l’agence «Amanda» a obligé les jeunes soudanais à signer des papiers, pour certifier qu’ils ne porteront aucune plainte contre elle ou contre la compagnie émiratie «Black Shield Security».

Rappelons toutefois, que le peuple soudanais, secoué par cette affaire, a organisé des manifestations dans tout le pays, dénonçant la politique tyrannique des EAU.

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