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Arabie saoudite: pourquoi le pays accorde la conduite aux femmes

Les Saoudiennes pourront enfin conduire, à partir de juin 2018. Une ouverture qui s’inscrit dans une vaste réforme sociale et économique voulue par le régime à horizon 2030.

Dans les mois qui viennent, les autorités saoudiennes devraient faire face à un tsunami de demandes de permis de conduire. Le roi Salman a en effet ordonné ce mardi la fin, pour juin prochain, de l’interdiction faite aux femmes de prendre le volant. Une petite révolution pour le royaume, dernier pays qui réserve la conduite aux hommes. L’initiative s’inscrit dans un mouvement de réformes sociales et économiques, dont l’ampleur est inédite depuis la fondation du régime.

L’époque est aux changements depuis l’accession du roi Salman au trône, à la mort de son demi-frère, le roi Abdallah, en janvier 2015. C’est cette année-là, en novembre, que les femmes ont pu pour la première fois voter et même se présenter, pour des élections municipales. Près d’un millier d’entre elles se sont présentées, mais elles n’ont jamais pu faire campagne directement, contraintes de passer par un porte-parole masculin ou de s’exprimer derrière une cloison. 14 femmes ont été élues sur plus de 2100 sièges à pourvoir.

Ce droit de vote avait été accordé par Abdallah en 2011, à la suite des révolutions du printemps arabe. Le statut de la Saoudienne suit peu à peu l’évolution de la réalité sociale du pays. Les universités du pays comptent ainsi bien plus d’étudiantes que d’étudiants. Avant l’annonce de mardi, plusieurs mesures ou anecdotes ont illustré la libéralisation, certes timide, du pays. Ainsi, ce samedi, pour la première fois, des Saoudiennes ont été autorisées à participer à la fête nationale dans un stade, grâce à la création d’une section « familles ».

Des signaux d’ouverture

En juillet, le ministère de l’Éducation a autorisé les jeunes filles à faire du sport dans les écoles publiques. Ce même mois, l’affaire d’une jeune femme qu’une vidéo montrait en train de déambuler en mini-jupe, sans voile et nombril à l’air, dans un bastion conservateur, a été rapidement classée par la justice. Quelques années plus tôt, son arrestation n’aurait pas été sans conséquence.

Longtemps crainte, la police religieuse et des moeurs du royaume, la fameuse Commission pour la promotion de la vertu et la prévention du vice, n’a plus qu’une fonction de signalement à la police. Une décision prise par le cabinet de Salman en avril 2016.

Derrière toutes les avancées décidées sous Salman, 81 ans, on trouve la patte de son fils préféré, Mohammed ben Salman, âgé de 32 ans. Ce dernier est le véritable régent du royaume, et le premier dans l’ordre de succession après que Moukrine et Mohammed ben Nayef ont été écartés, respectivement en avril 2015 et juin 2017. Jamais, avant Salman, des prince-héritiers n’avaient été démis de leur titre.

Pour le royaume, l’abolition de restrictions visant les femmes est surtout un enjeu économique. Ces mesures s’inscrivent dans la vaste planification de réformes présentée par Mohammed ben Salman en avril 2016: « Vision 2030 ». À l’époque, le pays traversait une grave crise budgétaire. Pour développer le secteur privé et multiplier par six les revenus non-pétroliers, notamment ceux issus de l’export, il a fixé comme objectif de faire passer de 22 à 30% la part des femmes exerçant une activité professionnelle.

Or, comme le soulignait en novembre 2016 le célèbre milliardaire et prince Al-Walid, propriétaire de chaînes de télévision et du palace parisien le George V, les restrictions telles que celles imposées en matière de conduite de véhicule ont un « coût économique ». Il avait notamment souligné qu’un époux contraint de déposer en voiture sa femme à son travail se retrouve en partie absent du sien et voit sa productivité réduite.

Les femmes, actrices de « Vision 2030 »

Le prince héritier estime que cette ouverture économique, s’appuyant sur la force d’appoint motivée que constitue les Saoudiennes, n’est possible qu’en desserrant l’étau imposé depuis des décennies par l’idéologie wahhabite. La promotion du sport et de divertissements comme le cinéma et les concerts est d’ailleurs au coeur de « Vision 2030 », même si la mixité ne concerne pas encore ces domaines.

De larges restrictions continuent de s’appliquer aux Saoudiennes. Elles ne peuvent pas se marier, divorcer, voyager, ouvrir un compte en banque ou travailler sans la permission de leur époux ou de leur tuteur. Officiellement, hommes et femmes ne peuvent évoluer côte à côte, sauf dans les hôpitaux ou les banques, et la loi impose que des murs les séparent, notamment dans les entreprises. Elles ne peuvent porter en public d’autre vêtement qu’une abaya.

Autre point non négligeable: en légalisant la conduite de voiture pour les femmes, Mohammed ben Salman détourne provisoirement l’attention internationale de la désastreuse guerre yéménite, dans laquelle son pays s’est impliqué en mars 2015, sans mandat international et de la crise qu’il a provoqué avec le Qatar. Il allume également un contre-feu, après l’arrestation arbitraire de dizaines d’opposants au régime ces dernières semaines. Des arrestations révélatrices d’une nouvelle forme d’autoritarisme à Riyad, comme l’explique sur le site Orient XXI le chercheur Stéphane Lacroix, spécialiste du pays. Alors que le droit des femmes connaît un mieux en Arabie saoudite, les droits de l’Homme sont eux en recul.

SourceL'Express

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