Irak : des heurts font 12 morts à Bagdad après l’annonce par Moqtada Sadr de son retrait de la politique

Douze personnes ont été tuées lundi 29 août dans la Zone Verte de Bagdad, en plein chaos après un nouveau coup d’éclat du leader chiite Moqtada Sadr, qui a annoncé son « retrait définitif » de la politique en Irak, désormais sous couvre-feu.

Dans l’impasse politique depuis les législatives d’octobre 2021, le pays ne cesse de s’enfoncer dans la crise. Lundi, la situation a brutalement dégénéré dans la capitale et des centaines de partisans du leader chiite ont envahi le palais de la République, où siège le Conseil des ministres.

Alors qu’ils investissaient les bureaux, s’installant dans des fauteuils, sautant dans la piscine ou prenant des selfies, les forces de l’ordre sont intervenues, tirant des grenades lacrymogènes pour disperser les manifestants aux entrées de la Zone Verte, qui abrite les sièges des institutions et l’ambassade américaine.

Couvre-feu national

L’armée a décrété un couvre-feu national, entré en vigueur à 16 heures, et les forces de l’ordre ont quadrillé la capitale. Des témoins ont fait état d’échanges de tirs entre sadristes et partisans du Cadre de coordination, le camp rival pro-Iran.

La mission de l’ONU en Irak, dont le siège se trouve dans la Zone Verte, a appelé les manifestants à quitter les lieux, exhortant toutes les parties à la « retenue maximale ». En soirée, le chaos a gagné d’autres régions irakiennes : dans la province de Zi Qar (sud), plusieurs partisans de Moqtada Sadr ont envahi le siège du gouvernorat et pénétré dans d’autres bâtiments officiels à Nassiriyah.

Le siège du gouvernorat de Babylone (centre), dans la ville de Hilla, a également été occupé et plusieurs routes reliant Hilla à Bagdad et à d’autres provinces du sud ont été coupées.

Ni gouvernement ni président

Depuis près d’un an, les barons de la politique ne parviennent pas à s’accorder sur le nom d’un nouveau premier ministre. L’Irak, l’un des plus grands producteurs de pétrole au monde, n’a donc ni nouveau gouvernement ni nouveau président depuis les législatives.

Pour sortir de la crise, Moqtada Sadr et le Cadre de coordination s’accordent sur un point : il faut un nouveau scrutin anticipé. Mais si Moqtada Sadr insiste pour dissoudre le Parlement avant tout, ses rivaux veulent d’abord nommer un gouvernement.

Moqtada Sadr, aussi influent qu’imprévisible, n’a cessé de faire monter les enchères ces dernières semaines : depuis un mois, ses partisans campent aux abords du Parlement et ont même bloqué brièvement l’accès à la plus haute instance judiciaire du pays.

Un poids lourd de la politique

Lundi, dans un nouveau rebondissement, il a annoncé son « retrait définitif » de la politique et la fermeture de plusieurs institutions liées à sa famille. Le leader chiite est l’un des poids lourds de la politique qui peuvent envenimer la crise ou sortir le pays de l’impasse car son aura religieuse et politique porte dans une partie de la communauté chiite, majoritaire en Irak.

Pour Hamzeh Hadad, chercheur invité au Conseil européen pour les relations internationales (ECFR), son annonce « n’est pas très claire ». « Dans la tradition sadriste, on peut s’attendre à ce qu’il fasse marche arrière », dit-il. Mais, « et c’est plus terrifiant, on peut penser qu’il donne à ses partisans le feu vert pour faire ce qu’ils veulent, en disant qu’il ne répond plus de leurs actions ».

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