Tunisie: la grève des magistrats reconduite pour une troisième semaine

Les magistrats tunisiens ont décidé, samedi, de reconduire pour une troisième semaine d’affilée leur grève, observée en signe de protestation contre la révocation par le président de la République, Kaïs Saïed, de 57 juges, accusés entre autres de corruption.

En vertu d’une décision de l’Association des magistrats tunisiens (Amt, indépendante), les juges tunisiens observent, depuis le 6 juin courant, une grève de travail pour rejeter et protester contre la décision de révocation de 57 de leurs confrères.

Dans une déclaration faite à l’Agence Anadolu (AA), Mourad Massoudi, président de l’Association tunisienne des jeunes magistrats (Atjm – indépendante), a souligné qu’il a été « décidé au cours d’une séance plénière des structures de la magistrature, tenue aujourd’hui, de reconduire la grève pour une troisième semaine, et ce à l’unanimité de l’ensemble des juges présents ».

Il a ajouté que « la grève, en vigueur depuis deux semaines, n’a pas porté ses fruits, à cause du peu de cas que fait le président de la République à l’endroit des mouvements des magistrats, raison pour laquelle les structures judiciaires ont décidé de prolonger la grève pour une troisième semaine », ajoutant que « Si cette mesure n’aboutira pas, nous envisageons de prendre d’autres décisions ».

Massoudi a indiqué qu’il a été « décidé d’organiser une ‘journée de colère’, la semaine prochaine sans préciser le jour, et à laquelle participeront tous les juges tunisiens pour exprimer leur refus des politiques de Saïed ».

Il a relevé, aussi, que nombre de juges révoqués ont pris la décision « d’observer une grève de faim sauvage à partir de lundi prochain, et qu’ils publieront une déclaration pour annoncer les arrangements de cette grève ».

Il a, par ailleurs, indiqué « avoir fait l’objet, ainsi que le président de l’Amt, Anas Hamaïdi, de harcèlement sécuritaire voire de menaces de liquidation de la part de certaines parties (qu’il n’a pas nommées) », tenant pour responsable le président de la République de « toute atteinte à son intégrité physique ».

Le 1er juin, Kaïs Saïed avait émis, un décret-loi portant révocation unilatérale de 57 magistrats sur fond d’accusations qui leur ont été adressées dont « l’obstruction au déroulement de l’instruction, l’entrave à l’exercice de la justice en lien avec des affaires de terrorisme, la corruption financière, et l’outrage aux mœurs ».

Cette décision a été rejetée sur le plan interne, en particulier par des syndicats et des partis politiques. De plus, des critiques internationales ont été formulées, notamment, de la part des Etats-Unis d’Amérique et de l’ONG « Amnesty International ».

La Tunisie souffre, depuis le 25 juillet dernier, d’une crise politique aiguë, lorsque le président Saïed avait imposé des « mesures d’exception », en limogeant le Chef du gouvernement, en suspendant les activités du Parlement avant de le dissoudre le 30 mars 2022, et en légiférant par voie de décrets.

Plusieurs forces politiques et civiles tunisiennes rejettent ces mesures qu’elles considèrent comme étant un « coup d’Etat contre la Constitution », alors que d’autres forces les considèrent comme étant une « restauration du processus de la révolution de 2011 », qui avait fait chuter l’ancien président Zine El Abidine Ben Ali.

De son côté, Saïed estime que ses mesures interviennent « dans le cadre de la Constitution pour protéger l’Etat d’un danger imminent », mettant l’accent sur « l’intangibilité des libertés et des droits ».

Quitter la version mobile