Demandes aux autorités tunisiennes de renoncer aux restrictions imposées aux organisations de la société civile

Des organisations de défense des droits humains ont demandé, vendredi, aux autorités tunisiennes de renoncer à imposer des restrictions sur la société civile.

C’est ce qui ressort d’une déclaration cosignée par 13 organisations tunisiennes et internationales, dont Human Rights Watch et publiée sur le site de cette organisation non gouvernementale.

Parmi les signataires de la déclaration, figurent entre autres « Avocats Sans Frontières », « EuroMed Droits », et « Amnesty International ».

« Les autorités tunisiennes devraient immédiatement renoncer à imposer de nouvelles restrictions aux organisations de la société civile », indique le texte de la déclaration.

Et les 13 organisations de défense des droits humains d’avertir, « Ce projet, s’il était mis en œuvre, serait un recul majeur par rapport aux progrès accomplis en matière de liberté d’association à la suite de la révolution tunisienne de 2011 ».

« Il (ce projet) constituerait un nouveau coup porté aux garanties relatives aux droits humains par le président Kaïs Saïed depuis que celui-ci a pris les pleins pouvoirs, en juillet 2021 (après avoir annoncé des mesures d’exception dont le gel du Parlement) », lit-on de même source.

« Les Tunisiennes et les Tunisiens savent d’expérience les dangers que des lois restrictives peuvent représenter pour la société civile et le débat public », a déclaré Amna Guellali, directrice régionale adjointe pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à Amnesty International.

« Pendant l’ère Ben Ali, extrêmement répressive, les autorités se sont appuyées sur des réglementations restrictives à l’égard des associations et sur des procédures administratives contraignantes, qui ont joué un rôle clé pour museler la dissidence », a-t-elle ajouté.

Selon Guellali, le projet de loi visant à réglementer les activités des organisations de la société civile confèrerait à l’administration des pouvoirs excessivement larges, discrétionnaires, lui permettant de s’immiscer dans les modalités de création des organisations de la société civile, leur fonctionnement, leurs activités et leur financement, ainsi que leur capacité à rendre compte publiquement de leur travail et à exprimer leurs vues.

Dans une allocution filmée, diffusée en date du 25 février 2022, le président Kaïs Saïed a accusé les organisations de la société civile de servir des intérêts étrangers et de tenter de s’ingérer dans la politique tunisienne, et a annoncé son intention d’interdire tout financement étranger de ces organisations. Le président tunisien a indiqué qu’un projet de loi est en cours d’élaboration par les autorités compétentes, à cet effet.

Le directeur adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch, Eric Goldstein, a souligné de son côté que « Pendant les 10 années qui ont suivi la chute de Ben Ali, les organisations non gouvernementales de Tunisie ont joué un rôle crucial, offrant à la population des services essentiels et demandant des comptes au gouvernement (…) Leurs activités doivent être encouragées et protégées, et non menacées ».

Les autorités tunisiennes n’ont pas commenté pour l’heure la publication de cette déclaration. Généralement, elles démentent de pareilles accusations, réaffirmant leur engagement à « préserver les droits et libertés ».

Le décret-loi n° 2011-88 du 24 septembre 2011, portant organisation des associations permet à toute personne physique, tunisienne ou étrangère résidente en Tunisie, de constituer une association ou d’y adhérer ou de s’en retirer.

Cependant, l’article 35 du présent décret-loi interdit aux associations d’accepter des aides, dons ou donations émanant d’Etats n’ayant pas de relations diplomatiques avec la Tunisie ou d’organisations défendant les intérêts et les politiques de ces Etats.

L’article 35 du nouveau projet de loi imposerait une nouvelle obligation : tout financement étranger devrait être approuvé par la Commission tunisienne des analyses financières, un service de la Banque centrale de Tunisie chargé de lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

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